La Montagne Blanche, partie 3
Le soleil levé, la progression était un peu plus facile. L’air se faisait plus rare et plus froid aussi, obligeant à des pauses un peu plus longues et fréquentes. La consommation de potions échauffantes était devenue plus fréquente et Cord commençait à se demander si il en aurait assez pour le retour. Devant eux, Kaerun tirait le groupe comme un cheval furieux et avalait les distances, prenant des risques et rechignant aux pauses pour parcourir le plus de chemin possible. À tel point qu’il commençait à en devenir un peu dangereux à être aussi obstiné.
Commençant à respirer plus difficilement sous l’effort, Alek demanda une nouvelle pause et Zardak tira sur la corde pour en avertir Kaerun. Comme s’il n’avait rien remarqué, celui-ci continua de marcher. Zardak tira plus intensément, mais le guerrier semblait faire la sourde oreille.
Le templier utilisa alors ses pouvoirs et sonda l’esprit du guerrier. L’intensité de la colère qui l’habitait le fascina. Kaerun était poussé par une haine féroce, touchant fréquemment d’une de ses mains le manche glacé de la dague noire. Il sentait qu’il approchait du but et succombait lentement à sa douleur.
-Kaerun, arrête-toi! cria Zardak
Le guerrier continuait sa route, tirant de plus en plus fort sur la corde de rappel.
Zardak se fâcha et fit appel au pouvoir du vent pour faire apparaître une brusque rafale face au guerrier, qui le renversa sur le dos. Grognant, Kaerun tenta de se remettre debout avant de sentir l’air se comprimer au-dessus de lui et l’immobiliser au sol. Zardak s’avança alors et lui parla.
-Lorsque je te demande d’arrêter, j’aimerais bien que tu m’écoute, dit Zardak au guerrier étendu.
-Libère moi, Zardak! Nous devons continuer. Ils ont tuer Sera et doivent payer pour leur geste. Enlève ce poids.
-Te souviens-tu de ton serment, frère? Nous nous sommes jurer protection devant Garados, un serment inviolable. Je dois donc te protéger.
-Je n’ai pas besoin de protection, rétorqua sèchement Kaerun
-Si… contre toi…
Comprenant enfin, Kaerun baissa honteusement la tête et Zardak sentit la haine s’estomper pour faire place à la tristesse, une immense tristesse. Il libéra son frère de la masse d’air et laissa ce dernier s’asseoir sur une roche un peu plus loin pour remuer ses pensées. Pour la première fois de sa vie, Zardak vit des larmes s’échapper des yeux du guerrier, se changeant rapidement en glace.
Oreth s’approcha alors de Zardak.
- C’est étrange, confia le Vixen au templier. Je ressens le trouble de Kaerun, il me replonge lorsque j’étais enfant et que j’ai vu mes parents mourir devant moi. J’ai l’impression de replonger avec lui dans l’abîme de douleur qui donne des forces et ronge l’esprit.
Oreth n’avait pas l’habitude de parler de son passé et cette confession étonna Zardak. Cord s’approcha alors à son tour.
-Moi aussi, cette douleur me dit quelque chose, je l’ai déjà ressenti dans un autre contexte. Kaerun est brisé et son esprit est embrouillé par la colère. Il serait peut-être bon qu’il ne prenne plus les rênes du groupe dans son état.
-Non, Kaerun est tenu par son honneur et n’y faillira pas, rétorqua Zardak. Son cœur est certes brisé, mais sa loyauté est inébranlable et ne peut-être mise en doute. Cela peut paraître singulier, mais il cherche à se faire pardonner et ne pourra y parvenir quant se prouvant à lui-même qu’il est digne de son serment. Laissons le évacuer ses émotions, puis il redeviendra le guerrier que nous connaissons. Je vous en donne ma parole.
Alek s’avança alors derrière.
-Pardonnez moi de déranger un moment si intense, mais je crois que nous avons de la visite, indiqua t’il en pointant le ciel.
Intrigués, le groupe se tourna vers la direction pointée. Un large groupe de formes ailé s’étaient envolé de la montagne et se rapprochait d’eux. Zardak fit signe à Kaerun de s’approcher. Le guerrier releva la tête et retrouvant sa tête de guerrier, examina le nuage ailé. Ils entendirent un bruit de fond, sorte de mélange de cri gutturaux et de croassement horribles, alors qu’un large groupe de créature étranges de rapprochait d’eux. On eut dit une hideuse chauve-souris avec des ailes et des plumes de corbeau. Alek empoigna son arc à l’instar de Kaerun et tout deux visèrent le nuage ailé. De leur coté, les magiciens préparèrent leurs sorts. Manifestement, ces oiseaux de malheur ne leur voulaient pas de bien.
Une fois le groupe rapproché, Alek tira une première flèche, faisant sombrer l’une des créatures avec une flèche en pleine tête. Kaerun fit de même, sa flèche trouant toutefois le vide sans rien rencontrer sur son passage.
Dans un grand cri, la nuée passa à l’attaque et fonça vers le groupe. Zardak utilisa ses pouvoirs et fit apparaître dans sa main une grosse boule de feu qu’il lança au sein des créatures ailées. L’explosion en abattit plusieurs, mais n’empêcha pas les autres de se ruer vers les aventuriers. Mordant, griffant, le bruit de leurs ailes était assourdissant alors qu’elles s’acharnaient sur le petit groupe. Ne sachant que faire, le groupe se débattait pour arracher et de défaire les volatiles, certains comme Kaerun et Zardak ayant plus de succès grâce à leurs griffes acérés. Oreth quant à lui, utilisa ses pouvoir pour rendre sa peau aussi dure que la pierre et laissa les hideux volatiles se briser les dents dessus, le sort ne durerait pas très longtemps toutefois et une autre solution devait être envisager rapidement.
Se débarrassant d’une autre créature d’un coup d’épée, Alek remarqua une grotte à quelque mètre de leur position et indiqua aux autres de s’y réfugier. Sans se faire prier, les autres se rendirent jusqu’à la grotte et y entrèrent. Ayant moins d’espace de mouvement, les créatures ne pouvaient plus les harceler d’aussi près et en nombre sans se gêner dans leur propre vol, permettant aux aventuriers de riposter plus efficacement de leurs armes. Aux premières lignes, Kaerun bloqua l’accès à ses compagnons de son corps massif et frappa furieusement les nuées de volatiles de ses deux épées longues. Alek, couvert de marque de griffures et de morsures, reprit son arc et recommença à abattre les hideuses bêtes volantes une à une de son arc.
La grotte se révélait être une véritable caverne et on entendit quelque chose hurler dans ses profondeurs. Puis un autre hurlement répondit en écho. Cord détourna son attention des volatiles et se retourna pour voir la source du bruit. Il entendit soudainement un concert de cris et de grognement se rapprochant à tout vitesse.
-Des loups des glaces! cria Cord en levant son marteau.
Crocs à nue, un souffle d’hiver jaillissant de leur gorges, la meute de prédateurs jaillit des profondeurs de la caverne et se jeta vers les aventuriers, déjà aux prises avec les volatiles. Poussant un puissant cri de guerre faisant écho dans la caverne, Cord entonna une pière de combat et frappa le premier loup bondissant d’un puissant coup de marteau, envoyant la créature sur le mur, le crâne brisé. Oreth vit le danger et invoqua rapidement une protection magique sur ses compagnons pour les protéger du souffle glacé des loups.
Le groupe se sépara en deux partie, l’une composé de Kaerun et Alek tentant de repousser les assauts incessant des oiseaux de malheur, l’autre formé de Zardak, Oreth et Cord faisant front contre la meute affamée au pelage blanc.
Zardak foudroya un loup d’un puissant éclair et en vit soudainement un bondir de l’arrière de la meute vers lui. Impuissant, le mage leva le bras pour se protéger, laissant le prédateur y mordre férocement. Cord intervint et écrasa le loup d’un puissant coup de marteau, permettant au mage de dégager son bras que marquait maintenant une douloureuse morsure glacée.
Furieux, le templier croisa ses bras, se concentra et prononça d’une voix forte la formule des mains ardentes.
Estern Magnus Pyrem
En un instant, de grandes langues de flammes jaillirent des paumes du Drake et bondirent sur les loups. La fourrure des trois prédateurs les plus près du mage s’embrasa aussitôt et devinrent de véritables torches vivantes et s’enfuirent en hurlant dans les tréfonds de la caverne. Cela ferait au moins cela de moins.
Alek encocha trois flèches cote à cote, visa rapidement et tira. Trois bêtes volantes s’effondrèrent en même temps, percés de part en part. Kaerun sentit une griffe lui passer près de l’œil et donna un solide coup d’épée sur son assaillant ailé, lui séparant le corps en deux parties.
Sous les hurlements bestiaux et le sifflement du métal dans l’air glacé, la dernière créature tomba finalement sous l’arc d’Alek et les loups s’enfuirent dans les profondeurs. Le groupe poussa un grand soupir de soulagement, puis vérifia de tous étaient encore indemne. L’armure de Kaerun était striée de marque de griffes et de dents. Cord se dépêchait de soigner les blessures qui voyaient afin d’éviter qu’elle ne gèlent à l’air libre. Zardak réchauffa sa blessure aux bras de ses pouvoirs pour la dégeler avant de la faire examiner par le prêtre.
Heureusement, les pouvoirs protecteurs d’Oreth avaient de nouveau évités le pire, le mage avait pu éviter de nombreuses mutilations à ses compagnons en augmentant magiquement la résistance de leur vêtements et les avait protégés des effets meurtriers du souffle des loups tout en jouant avec l’esprit des prédateurs pour les désorienter et ralentir leur attaques. Tout cela sans que ces compagnons ne s’aperçoivent de rien, car ils ne connaissaient pas encore l’étendue de ses pouvoirs.
Sortant de la caverne, le groupe observa afin de vérifier si d’autre danger les attendait. Soudain, Kaerun, regardant vers le somment, pointa le doigt vers le haut et le groupe se retourna. Plus haut, une tâche noire qu’on devinait être un petit groupe escaladait la montagne, insconscients de leur présence.
-Ils sont là… Dépêchons-nous! grogna Kaerun, partant rapidement au devant.
Avant de stopper brutalement…
Dans un sifflement, une flèche venait de se planter dans le mur de glace à quelques centimètres devant son visage.
Se retournant rapidement, il en vit une deuxième filer vers lui. Dans un réflexe, il leva prestement le bras et bloqua de justesse la flèche de sa petite rondache, attaché à son bras. Suivant des yeux la trajectoire inverse la flèche, il repéra, sur une corniche un peu plus bas, l’expéditeur de l’objet. C’était un autre groupe d’aventurier, attirés par la promesse de pouvoir, qui tentait maintenant de les arrêter. Composé principalement de magiciens et d’archers avec un guerrier nain, ils lâchèrent à nouveau leurs projectiles vers le petit groupe. Avec une vitesse d’incantation spectaculaire, Oreth réagit en formant une bulle protectrice autour de ses amis, bloquant flèche et sorts tentant de les atteindre.
-Nous n’avons pas le temps de nous arrêter, dit Zardak, nous devons nous débarrasser d’eux au plus vite.
Alek réagit rapidement et encocha l’une des ses propres flèches, la laissant filer vers leurs agresseurs. Ceux-ci réagirent promptement en formant leurs propre boucliers. Zardak invoqua alors une tempête de glace autour d’eux, les forçant à former leur propre bouclier magiques pour se protéger.
Oreth s’avança
-Je peux le faire, dit-il simplement
Le vixen leva alors les bras au ciel et forma deux balles lumineuses dans ses mains qu’il projeta en tournoyant sur le groupe plus bas. Leurs boucliers magiques se brisèrent alors comme du verre et laissèrent passer les éclat de glace qui lardèrent leur assaillants. Bléssé mais non vaincus, ces deniers tentèrent de se relever. Oreth enchaîna alors et prononça une nouvelle incantation.
Spiritis Noma Horrifiam….
Les yeux du mage étincelèrent alors qu’il projeta son incantation. Dans la tête de leurs agresseurs se formèrent alors des images d’horreurs et des visions cauchemardesques. Horrifié, ils lâchèrent leurs armes, se débattant en vain contre les démons qui se formaient dans leurs esprits.
Satisfait, Oreth se retourna vers ses compagnons. L’expédition du tombeau d’Ashar n’aurait pas été vaine. Car l’ancien roi était un puissant mentaliste et ses sortilèges cachés n’étaient pas tombés dans la main d’un ignorant. Oreth pratiquait lui-aussi ce type de magie.